Sarah Marcha (Centre de Jineolojî / Réseau de Jineolojî Europe-International) présente les processus de création et d'organisation et les méthodologies d'étude, de recherche et d'éducation de la Jineolojî dans ses actions locales et internationales, en les contextualisant en regard de l'histoire du Mouvement des femmes kurdes. Les groupes de Jineolojî locaux disséminés à travers le monde au long d'un réseau d'échange soutiennent des processus dynamiques de la création de connaissance orienté par l'autonomie des femmes et le principe de la covivance libre.
Voir aussi :
Le site Internet du Réseau international de Jineolojî.
Le site Internet de la Revue Jineolojî, disponible aussi chez Pirtukakurdi.
L'ouvrage Jineolojî Committee in Europe (dir.), Weaving Another World, Black Rose Books, 2021.
La collection de vidéos Women Weaving Future sur les réseaux sociaux.
Jinwar. Village des femmes libres (Rojava) sur les réseaux sociaux.
Les ouvrages d'Abdullah Öcalan, Manifeste pour une civilisation démocratique (Vol. 1), 2019 et Manifeste pour une civilisation démocratique (Vol. 2), 2022, Éditions du croquant.
Par delà les frontières,
le travail de recherches et d'éducation de la Jineolojî
La Jineolojî est une proposition faite par Abdullah Öcalan dans le troisième volume de son Manifeste pour une civilisation démocratique intitulé Sociologie de la liberté. Le Mouvement des femmes kurdes était déjà organisé dans toutes les sphères sociales et politiques, en créant ses structures autonomes dans l’éducation, les médias, la justice et l’autodéfense armée, notamment. Afin d’accompagner la construction de ce projet d’émancipation démocratique et écologique, une révolution intellectuelle et scientifique basée sur un système de connaissances qui prenne en compte l’existence propre des femmes et leurs savoirs était aussi nécessaire. Dès 2011, le travail de Jineolojî a donc débuté dans les différentes régions du Kurdistan.
Étymologiquement la Jineolojî est la science de la femme et du vivant. À partir d’une vision holistique de l’univers, dont chaque composante de la société humaine et chaque être de la nature font partis, nous menons nos recherches en mettant le point de vue, la lutte et l’existence des femmes au centre de nos études. La Jineolojî développe une analyse et une critique des structures scientifiques de la Modernité capitaliste, des liens science-pouvoir-profit et des effets du positivisme sur la mentalité et la vie des femmes et de la société. Comme beaucoup d’autres courants académiques, la Jineolojî dénonce l’anthropocentrisme, l’androcentrisme et l’eurocentrisme fortement présents dans les systèmes de connaissances et d’éducation construits sous l’influence des points de vue sexiste, orientaliste et classiste de l’homme dominant occidental sujet, objectivisant femme, société et nature.
Avec la Jineolojî, nous souhaitons rompre avec cette approche en développant une science menée par les femmes en lien avec l’ensemble de la société. C’est avec cette perspective que les structures et le travail de recherche et d’éducation de la Jineolojî se sont développés dans les différentes régions du Kurdistan et du Moyen-Orient, ainsi qu’en Europe. Les travaux de la Jineolojî sont vastes et divers, car ils sont en constantes évolution et s’adaptent aux conditions et aux besoins spécifiques des femmes et de la société où ils sont menés. Cette intervention ne présente pas l’ensemble de ces travaux, mais essaie de vous donner un aperçu de la diversité des actions et recherches effectuées au sein de la Jineolojî, particulièrement au Rojava, l’Ouest de Kurdistan, au nord de l’État syrien.
Depuis le début de la révolution du Rojava, un système autonome des femmes, basé sur le système de confédéralisme démocratique, a été mis en place. Grâce à cette révolution, la Jineolojî s’est beaucoup développée dans cette partie du Kurdistan. La première question qui s’est posée pour pouvoir mener les différents projets de Jineolojî fut : qui sont les femmes du Rojava ? Quelle est leur réalité sociale ? Il était nécessaire de révéler et comprendre les différents processus de colonisation et la construction des États-Nations qui ont divisé le Kurdistan, génerant de nombreuses attaques contre la population en général et contre les femmes en particulier. Historiquement, ces dernières ont été systématiquement exclues des structures de connaissances par le système traditionnel patriarcal ou assimilées en tant que professeures et étudiantes au système nationaliste promut par le régime Baas. L’identité kurde étant niée par la narration officielle étatique qui imposait une identité nationale arabe, l’existence des femmes kurdes étaient totalement niée.
Le premier groupe de recherches de Jineolojî du Rojava a donc d’abord mené ses études sur l’histoire des femmes kurdes de ce territoire, depuis l’époque du néolithique pré-patriarcale jusqu’à aujourd’hui. Il existe une célèbre citation d’Abdullah Öcalan qui dit qu’« une fleur ne peut pousser que sur ces propres racines », c’est-à-dire que si vous ne savez pas qui vous êtes, où vous êtes et d’où vous venez, en tant que femme historique et sociale, vous ne pourrez pas vous émanciper et lutter de manière juste contre le système capitaliste. Le capitalisme cherche à pousser les individus à délaisser leurs origines et à s’éloigner de leur essence propre, afin de contrôler et diriger la société. La première étape de l’étude sociologique des femmes du Rojava était basée sur cette perspective. Le groupe de recherche a donc collecté tous les ouvrages scientifiques d’archéologie et d’histoire qui mentionnent ce territoire et les chercheuses se sont rendues dans les différents sites archéologiques et sites historiques existant en analysant particulièrement les vestiges de la culture mésopotamienne de la déesse-mère dans cette région. C’est important de noter que ces sites archéologiques sont constamment la cible de bombardements et d’attaques de destructions, autrefois de la part de l’État Islamique, comme l’avaient dénoncé de nombreux médias et organisations internationales, et aujourd’hui de la part de l’État turc et des groupes fondamentalistes qu’il soutient. Lorsque l’armée turque a envahi puis occupé la région d’Afrin en 2018, les attaques aériennes ont particulièrement visées l’ancien temple de la déesse Ishtar d’Ain Dara. Pourquoi ? Car il représente la preuve de la longue durée d’existence ancestrale du peuple kurde et de l’importance historique du rôle social et politique des femmes dans la région. Il y a dans ces vestiges, les traces des sociétés locales millénaires qui étaient bien plus démocratiques et égalitaires que les États actuels.
Ensuite, afin d’étudier la situation moderne, le groupe de recherche a rencontré toutes les structures et institutions autonomes des femmes telles que le Kongra Star, les YPJ, les coopératives, les organisations qui luttent contre la violence faite aux femmes, les académies, les partis politiques, etc. Aussi, elles ont organisé des rencontres et des interviews avec des centaines de femmes des différentes communautés nationales et religieuses qui cohabitent dans le Nord et l’Est de la Syrie, telles que les kurdes, arabes, assyriennes, syriaques, circassiennes, turkmènes, caldéennes, musulmanes, chrétiennes ou encore yézidies, par exemple. Le but était de mettre en lumière la réalité sociale et l’histoire de l’oppression et de la résistance des femmes dans cette région. Qu’est-ce qui a été préservé dans leur culture qui vient de l’héritage des valeurs néolithiques ? Qu’est-ce qui a été détruit au fil des différents processus de patriarcalisation, étatisation et colonisation ? Quel impact a eu la religion sur les femmes ? Quel impact a eu l’arrivée du modèle de l’État-nation ? Quels changements ont eu lieu depuis le début de la révolution en 2012 ? Quels sont les problématiques qui subsistent ? Qu’est ce qui pourrait être mis en place pour surmonter ces difficultés ? Ces questions ont été la base des recherches.
Le but de la Jineolojî en temps que science sociale est de trouver des solutions aux problèmes des femmes et de la société en générale pour construire la révolution des femmes sur l’idée d’une Nation démocratique et pour que les femmes puissent continuer de s’émanciper, de vivre et de travailler ensemble en respectant leur diversité. Le groupe de recherche en lui même, fait partie de cette société et du système confédérale démocratique du peuple. Ce projet de recherche n’a pas lieu en marge de la société ou depuis une instance académique distante, avec des chercheuses qui se différencieraient par une prétendue neutralité ou objectivité des autres groupes sociaux de femmes. Ces recherches sont menées avec la volonté de dépasser la relation sujet-objet, chercheuse-cherchée. Les chercheuses de la Jineolojî prennent position dans leurs études, c’est-à-dire qu’elles agissent pour la construction d’une Modernité démocratique. Elles sont côte à côte avec toutes les femmes de leurs société dans l’analyse collective des besoins de la vie sociale. Les membres des structures de Jineolojî font partie du système de communes et d’assemblées populaires, par exemple. Elles participent aux débats, aux analyses et aux prises de décisions dans les domaines de l’éducation, l’économie, la santé et autres. Les résultats de ses recherches sont ensuite discutés dans toutes les organisations de femmes qui vont partager leurs commentaires et réflexions afin que soit rédigée la version finale qui sera ensuite diffuser le plus largement possible, sous forme d’écrits, de séminaires ou autres. Ce qu’il faut retenir de ces études sociologiques, c’est qu’elles permettent d’avoir une vue globale de la situation des femmes dans un territoire donné.
Grâce à cela, des structures de Jineolojî, leurs programmes de recherche et d’éducation ont pu être développés en étant réellement et scientifiquement adaptés à la réalité de chaque canton et communauté qui les habitent. Plusieurs centres de recherches de Jineolojî ont ainsi vu le jour dans tout le Nord et l’Est de la Syrie. Le rôle de ces centres est de travailler sur des problématiques très locales afin de pouvoir émettre des perspectives de solutions qui renforcent le système démocratique à l’échelle cantonale ou à l’échelle de l’ensemble des territoires de l’Administration autonome.
Par exemple, après les premières périodes de confinement liées au Covid, partout dans le monde nous avons assisté à une augmentation de la violence contre les femmes. Au Rojava, il y avait également le besoin d’analyser ce problème et d’en comprendre les causes fondamentales. La tâche des centres de recherches était de rencontrer toutes les organisations qui touchent à la protection des femmes, à la défense de leurs droits et à la justice, telles que les Maisons des femmes par exemple, qui apportent leur soutien aux femmes contre la violence patriarcale au sein de la famille et de la société. Les groupes de recherche vont prendre connaissance et étudier les situations sur le terrain pour essayer de comprendre les problématiques vécues. Ensuite, des perspectives seront tirées des conclusions d’analyses collectives pour chercher comment renforcer l’organisation des femmes, pointer du doigt l’insuffisance de certaines mesures qui avaient été prises et mettre en place de nouveaux outils pour l’avenir, qui permettront de prévenir les situations les plus dramatiques telles que les suicides ou les féminicides notamment, en essayant d’identifier et de remédier à la racine des problèmes.
Un autre aspect fondamental de la Jineolojî est l’éducation, c’est à dire les méthodes de développement et de transmission de la connaissance en temps que processus dynamique entre les membres du travail de Jineolojî et leur connexion avec la société. Les membres des centres de recherche vont partager les études réalisées par la Jineolojî, pour les transmettre, les débattre et recueillir les réflexions et les expériences des femmes, des hommes, des jeunes et des enfants qui émergent pendant les différents moments de formation et discussions au sein des assemblées et des académies populaires.
Il existe également un département de Jineolojî à l’Université du Rojava qui est jumelée avec d’autres universités dans le monde. Tous les concepts et domaines d’action de la Jineolojî sont approfondis grâce aux recherches des professeures et des étudiantes qui travaillent ensemble pendant 2 ans d’études. Des séminaires en ligne et des échanges sont aussi mis en place avec d’autres universités, comme en Allemagne sur la question des féminicides, pour discuter de différentes thématiques par delà les frontières, rompant aussi l’embargo politique international imposé à l’Administration Autonome et favorisant les échanges malgré la situation de guerre qui rend difficile les déplacements à l’intérieur et vers la région. Ces échanges sont importants pour comprendre et analyser des problématiques qui ne touchent pas simplement à une réalité locale, mais a un système global en lien avec la lutte de libération des femmes partout dans le monde. Aussi, grâce aux rencontres online, les chercheuses et étudiantes de Jineolojî peuvent débattre les questions méthodologiques et épistémologiques qu’elles étudient et mettent en pratique. Ces discussions sont menées avec certains départements d’Études de genres à travers le monde, par exemple.
La Jineolojî a été également inclue dans le programme scolaire des lycées. L’histoire des femmes et les problèmes sociaux liés au sexisme sont enseignés et discutés avec les élèves, afin de créer les bases qui permettront d’impulser un changement de la mentalité sociale chez les jeunes et de développer réellement des relations démocratiques et écologiques fondées sur la libération des femmes. L’un des concepts important de la Jineolojî est celui de la Covivance Libre, Hevjiyana Azad en kurde, qui signifie la construction d’une vie libre ensemble fondée sur l’abolition des rapports de domination au sein de la famille et de la société. La pédagogie employée ne vise pas à imposer un savoir ou une manière de penser aux jeunes, mais de créer de la curiosité autour des thématiques de genre et de liberté. Cela crée bien sûr parfois de grandes contradictions chez les élèves entre les réflexions amenées pendant la classe et la réalité quotidienne vécue à la maison, par exemple. Ces contradictions provoquent certaines difficultés même parfois, mais ces difficultés permettent de favoriser les échanges et le dialogue au sein des écoles, parfois même au sein des familles tant des élèves que des professeures. Cette expérience dans les écoles du Rojava n’est pas la première, car dans le camp de réfugiées de Mahmour qui se trouve au Kurdistan du sud situé en Iraq, la Jineolojî est enseignée depuis 2010. Les manuels scolaires et la pédagogie évoluent en permanence pour à la fois intégrer les recherches récentes et adapter chaque fois mieux le contenu des cours pour amener connaissances et débats.
Un projet de transmission de contes traditionnels a aussi été réalisé avec les plus jeunes, dans les classes d’écoles primaires. Des grands-mères venaient leur raconter des histoires populaires et éveiller ainsi leur curiosité pour transmettre et discuter des valeurs et des traditions. Le Kurdistan et la langue kurde sont riches de littérature, d’histoires et de mythes qui sont sources de pensée éthique et des leçons de vie en soi. Une fois encore, ces histoires de grands-mères apportent les racines nécessaires à la croissance et l’embellissement des fleurs d’avenir que représentent les enfants.
La Jineolojî est également enseignée sous forme de séminaires et formations, allant de 1 jour à plusieurs mois, dans toutes les académies civiles et d’autodéfense armée du système du confédéralisme démocratique. Le but de ces académies est d’enseigner la théorie et la pratique du paradigme révolutionnaire, c’est-à-dire les valeurs et les méthodes d’organisations défendues et développées par les institutions populaires pour que chacun et chacune puisse y participer, ainsi que de transmettre l’histoire des femmes et des peuples du Kurdistan, du Moyen-Orient et du monde. Les formations peuvent être spécifiques parfois, pour les femmes d’un comité particulier, pour les jeunes ou exclusivement pour les hommes, par exemple. Le but du séminaire dédié à la Jineolojî est toujours le même, la transmission de connaissances, la réflexion collective et le débat social autour de la libération des femmes, la démocratisation de la famille, la transformation des hommes et la création d’une société libre, belle et juste.
La Jineolojî et les différentes structures d’éducation au Rojava sont un pilier de la conception d’autodéfense, dans le sens où plus une société sera éduquée moralement et politiquement, plus elle sera démocratique et capable de se défense intellectuellement et structurellement contre les idées et attaques sexistes, coloniales et capitalistes. La connaissance sociologique et historique apportée par la Jineolojî apporte les outils nécessaire pour révéler et comprendre comment emprunter les voies mentales et pratiques de l’émancipation. Cette connaissance n’est pas faite par et pour une élite académique, elle est faite par et pour les femmes et le peuple.
Je voudrais partager avec vous l’exemple de deux femmes pour illustrer la force de transformation sociale de la Jineolojî et de la révolution des femmes du Kurdistan. La première femme avait 42 ans au début de la révolution. Elle ne savait ni lire ni écrire le kurde bien sûr, car c’était interdit par l’État Syrien nationaliste de l’étudier avant, mais elle ne savais pas lire ni écrire l’arabe non plus, car à l’époque beaucoup de jeune fille étaient écartées de fait des bancs de l’école en général. Une partie de la population kurde était également considérée comme “non-citoyenne” et n’avait tout simplement donc pas accès au système scolaire. Cette femmes a commencé à apprendre à lire et à écrire grâce aux institutions de langue et d’éducation nées de la révolution et aujourd’hui elle est professeure de langue kurde et de Jineolojî. Cela a eu directement un impact dans la vie de cette femme, comme dans celle de nombreuses femmes de la société, autrefois socialement vouées à l’analphabétisme.
Le processus de révolution intellectuelle prend du temps bien sûr, parce que c’est un processus collectif qui vient de la base de la société. La Jineolojî n’est pas une science que l’on développe avec l’idée d’en faire une 'carrière' académique, elle ne se base pas sur une conception capitaliste de la carrière scientifique, on ne cherche pas non plus à monter dans la hiérarchie universitaire. Au contraire, nous nous aidons les unes les autres, nous mettons tout en oeuvre pour que toutes les femmes puissent faire les pas nécessaire au développement de leur savoir avec leur propre volonté.
La deuxième femme dont je voudrais vous parler, c’est Malda qui était membre du centre de recherche de Jineolojî de la ville d’Hesekê au Rojava. Elle avait rejoint le travail du centre après avoir étudié 2 ans dans l’Académie de Mésopotamie, l’académie de Sciences sociales. Elle était très jeune et pourtant elle donnait déjà des cours de Jineolojî dans les académies populaires avec parfois jusqu’à 300 hommes en face d’elle, par exemple des Forces démocratiques syriennes, c’est-à-dire de la branche armée de défense du peuple. Cela aurait été impossible avant la révolution qu’une jeune fille avec son identité kurde aille donner des leçons d’histoire et de libération des femmes, et discuter de transformation de la mentalité de l’homme dominant contre la pensée patriarcale dans les écoles militaires de l’armée du régime syrien. Cela n’existe d’ailleurs nulle part ailleurs au monde en fait, pas même dans les écoles civiles des pays définis communément comme démocratiques. Malda représentait cette révolution. Elle a construit son savoir et sa confiance en elle avec pour objectif de construire sa société et de changer le monde. En 2019, Malda a été victime d’une attaque de l’État Islamique qui a touché la voiture dans laquelle elle se trouvait et a été tuée sur le coup. Les attaques au Rojava sont continues et visent à empêcher que le projet démocratique puisse continuer de se développer, mais pour nous Malda est toujours vivante, elle est l’une des femmes qui symbolisent l’esprit de résistance scientifique et la révolution intellectuelle qui porte l’expansion de la science de la vie au Kurdistan et dans le monde.
La Jineolojî attire des femmes de toutes les origines. Au Kurdistan, les femmes turques, arabes, assyriennes et autres rejoignent les structures déjà existantes ou créées elles-même de nouvelles structures aux côtés de leurs amies kurdes. Malgré les difficultés liées à la guerre et aux attaques des États-nation, la Jineolojî a très vite traversé les frontières. Entre 2014 et 2016, il y a eu 3 conférences de Jineolojî qui ont eu lieu en Europe et en 2017 un Centre de Jineolojî a été fondé à Bruxelles. L’objectif de notre travail en Europe est de faire connaître les fondement de la Jineolojî, de discuter de ces fondements avec les femmes de tous les milieux sociaux et de toutes les cultures pour avancer ensemble dans le développement de recherches et de perspectives communes pour libérer la science et la société de l’influence de la Modernité capitaliste. Pour cela, le Centre de Jineolojî de Bruxelles a, entre-autre, un programme d’éducation populaire, participe à des séminaires universitaires, monte des projets de dépatriarcalisation et décolonisation des collections archéologiques des musées, rédige et traduit des articles scientifiques ou des ouvrages de recherche historique et sociologique. Pour accueillir des femmes qui vivent en Europe ou dans d’autres régions du monde et qui souhaiteraient se rendre au Rojava, nous avons un partenariat avec l’Institut Andrea Wolf de Jineolojî sur place. Aussi, nous soutenons le travail d’échange entre l’Université du Rojava et d’autres universités du monde. En général, le Centre de Bruxelles et toutes les structures de Jineolojî sont ouvertes à toutes les propositions de nouveaux projets ou partenariats pour l’avenir. Nous soutenons et diffusons également les projets du Village des femmes de Jinwar, un village coopératif et écologique entièrement habité et autogéré par des femmes et leurs enfants.